Naissance d’une maison d’édition : les livres d’artistes
Réussissant à réunir peintres et écrivains modernistes, Kahnweiler lance également ses Livres d'artistes, Éditions Kahnweiler. Il s’agit plutôt de livres pour amoureux du livre, pour bibliophiles avertis, amateurs de textes et d’art. Il n’édite cependant et, soulignons-le, courageusement, que des auteurs contemporains dont les textes sont des premières éditions.[1] Il importe toutefois de remarquer son intuition, le don de dénicher des talents, également dans le domaine de l’écriture.
C’est Derain qui a dessiné l'emblème de la maison d’édition et illustré L'Enchanteur pourrissant de Guillaume Apollinaire en 1909. Picasso s’est chargé d’illustrer Saint Matorel de Max Jacob en 1911. Bien d’autres suivront : Malraux, Artaud, Salacrou, Limbour, Leiris, mais aussi Satie, Reverdy, Bataille, Desnos, Radiguet ou Ponge, illustrés par des gravures commandées aux artistes de sa galerie (Derain, Braque, Picasso, Gris, Léger, Masson, Laurens, Beaudin). Kahnweiler profite de l’engouement pour le genre en ce début du XXe siècle, période pendant laquelle le livre illustré, qui reflète l’alchimie entre un écrivain et un artiste, a connu son apogée. Une vignette gravée HK représentant les initiales de l’éditeur orne tous les ouvrages et symbolise le soin apporté à leur édition et à la fabrication : « Un livre ne peut être parfait que s'il ne contient pas plus de deux fautes », avait coutume de dire Kahnweiler, intraitable sur la qualité des livres de sa « maison ». Entre 1909 et 1968, il publiera 42 livres sur les mêmes principes, dans les trois maisons d’édition successives qu’il a créées. Tout nouvel artiste de la galerie se doit de faire les images d’un futur livre !
[1] Marta-Volga de Minteguiga-Guezala, « Kahnweiler. Le désir de livre. 1909-1968 », in Daniel-Henry Kahnweiler marchand et éditeur. Cat.expo, Museu Picasso, Barcelone, 2023.
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