Un écrin : l’Hôtel Salé

En juillet 1976, Michel Guy, confirme, en accord avec les héritiers, la création d'un musée national Picasso qui accueillera les œuvres reçues par l'État, à titre de « dation ». Michel Guy, amateur d’art moderne, fin connaisseur du milieu et lui-même collectionneur, se fera l’infatigable initiateur de l’entrée d’œuvres dans les collections publiques grâce à cette nouvelle loi, particulièrement adaptée dans le cas de Picasso. Décision est prise d’investir l'hôtel Salé, dont l'entrée monumentale, ouvrant sur une grande cour d'honneur, donne sur la rue de Thorigny, dans le Marais. Cet hôtel, classé monument historique en 1968, et l'un des rares édifices classés de cette taille, appartient à la Ville de Paris.

Michel Guy lance un concours d'idées auprès d'un nombre restreint d'architectes, et retient le projet de Roland Simounet. Celui-ci prévoit de vider pratiquement l'édifice à l’exception de l'escalier monumental intérieur, ce qui permet de dégager 4 500 mètres carrés.

Après avoir montré quelques réticences, Jacqueline, veuve de l’artiste, et les descendants du peintre ont finalement accepté l'idée d'installer le musée Picasso à l'hôtel Salé. Ils craignaient qu'il ne soit trop petit. Michel Guy, au cours d'une émission télévisée, avait annoncé son ouverture pour 1976… En 1983, l’ancien secrétaire d’État déplorait les « pesanteurs administratives, que j’appelle plutôt les négociations franco-françaises » qui retardaient le dossier[1]. De fait, après de multiples et difficiles négociations, les clauses du bail consenti à l’État par Ville (entretemps devenue une collectivité locale de plein exercice avec la première élection d’un maire en 1977)  ne seront arrêtées qu’en 1979. Elles prévoyaient notamment que la Ville participait pour moitié à la dépense de restauration du gros œuvre, et que l’État prendrait à sa charge la totalité des travaux dans le bâtiment. Les travaux dureront près de dix ans, l’ouverture du Musée ayant lieu le 23 septembre 1985.

C'est Dominique Bozo(1935-1993), alors conservateur au Musée national d'art moderne, qui est chargé par Michel Guy de faire, en collaboration avec Jean Leymarie (1919-2006), ancien conservateur en chef du Musée national d'art moderne et organisateur de l’hommage de 1966, le choix de la collection que l'État recevra en dation, ainsi que son installation dans le nouveau musée. Il est assisté d’un groupe de travail qui comprend Michèle Richet, conservatrice, Roland Penrose, Pierre Daix et Maurice Besset. « Michel Guy avait poussé la roue en prenant, au début de 1975, une triple décision : la création d’un musée Picasso, son installation à l’hôtel Salé, dans le Marais, et, en accord avec Maurice Aicardi, la nomination, comme maître d’œuvre du futur établissement, de Dominique Bozo, savant, sensible et diplomate. »[2]

 

[1] Antenne 2, 2mai 1983.

[2] L’Express, 29 septembre-5 octobre 1979, « Picasso », par Pierre Schneider, page 153.

La façade de l'Hôtel Salé devenu le Musée national Picasso-Paris.
La façade de l'Hôtel Salé devenu le Musée national Picasso-Paris.
L'Hôtel Salé, le grand escalier.
L'Hôtel Salé, le grand escalier.