André Verdet et la lumière de Picasso.

André Verdet (1913-2004) fut très lié à Picasso. Poète, peintre, sculpteur et musicien, cet esthète demeurant à Saint-Paul-de-Vence devint proche de l'artiste quand celui-ci s'installa dans le Midi, en 1948.


André Verdet est épris d'art et de culture dès son plus jeune âge. Sa vie durant, il se consacre à l'écriture et la poésie. Mais c'est au cours de la Seconde Guerre mondiale qu'il se révèle: résistant, il entre au mouvement Combat. Il en devient un membre actif, sous le pseudonyme de «commandant Duroc» et se lie alors avec Robert Desnos. Tous deux sont arrêtés ensemble, par la gestapo, en 1944. André Verdet, incarcéré à la prison de Fresnes, est interrogé par les Brigades spéciales, de sinistre réputation, puis déporté à Auschwitz et à Buchenwald. C'est là qu'il fait la connaissance de Boris Taslitzky et Jorge Semprun, dont il restera proche. Libéré en 1945, il fréquente Jacques Prévert, avec qui il publie, Souvenir du Présent (La Nouvelle Édition, 1945) et qui lui présente «Pablo Picasso dont toute ombre porte déjà en soi le triomphe prochain de la lumière». Picasso qui «déforme décompose supprime sans rien détruire afin de mieux reformer recomposer reconstruire pour tâcher d'assumer l'intégrité essentielle des formes des couleurs et des traits.» (L'Homme au mouton, Éditions Falaize, 1950). Prévert disait de Verdet qu'il «écrit des poèmes de vive voix de la main à la main et de gaîté de coeur et parce que ça lui fait plaisir et il se promène dans ses poèmes à la recherche de ce qu'il aime ...». Verdet signe un premier roman La nuit n'est pas la nuit, en 1947, relatant sa déportation. De son matricule 186.254, Picasso dira que ce numéro est «l'enfer des pestes brunes». Verdet reste marqué à vie par cette période et selon lui, le poète accomplit simplement un métier d'informateur, de témoin. Sa responsabilité à l'égard des autres consiste à lutter «sans faiblesse mais avec gravité et humour» contre tout ce qui tend à emprisonner l'être humain dans une servitude quelconque.»

Tout au long de sa carrière, il écrit de nombreux ouvrages, notamment sur l'art et les artistes. «Forme qui transcende le contenu, contenu qui transcende la forme, vérité éternelle sans doute et sans cesse répétée, mais vérité rarement décevable dans l'oeuvre de tant de peintres si grands soient-ils. Les deux éléments caractériels, essentiels d'un dessin se coiffent chez Picasso d'un troisième élément: élément novateur proprement picassien. Chaque fois que l'artiste tire un trait, il scie dans la lumière. Un trait de lui partage la lumière. Quand il se place devant une surface blanche, il lui suffit de tirer un trait pour que, instinct et génie propre, il crée et organise des valeurs lumineuses. Il le fait par sa façon de situer le trait dans le contexte [...], il le fait aussi parce qu'il possède l'oeil total» peut-on lire dans La Griffe de Picasso, (Éditions Parler, 1961).

Dès 1957, Verdet, qui dit avoir appris à écrire avec Prévert et à peindre avec Picasso, expose régulièrement. En 1961, sous l'influence de Picasso, il réalise ses premières céramiques à Vallauris, chez Madoura. Il publie en 1975 un recueil de poésies Le ciel et son fantôme (Éditions Galilée) et réalise son premier disque en 1980: Picasso-Blues. André Verdet est décédé en 2004, il avait 91 ans. Une partie de sa collection, comprenant, entre autres, des oeuvres de Picasso, Léger et Mirò, a été donnée à la ville de Cordes-sur-Ciel.

Portrait-dédicace, 1949 (donation de André Verdet) Cagnes-sur-Mer, Château-Musée Grimaldi