Des débuts internationaux
L’important marchand allemand Thannhauser rafle trois Picasso dont le monumental Saltimbanques. Comme en témoigne le journaliste Seymour de Ricci, personne n’aurait pu l’atteindre, le marchand allemand aurait dépensé le double pour cette œuvre s’il l’avait fallu. Quelques mois avant la première Guerre, une telle victoire associée à la présence en nombre de marchands Allemands à Drouot va donner à la vente une tournure politique. Ainsi le journal conservateur Paris-Midi sous la plume de Delcourt affirme au lendemain de la vente : « …De gros prix y ont été atteints par des œuvres grotesques et informes d’indésirables étrangers et ce sont les allemands qui, comme nous n’avons cessé de le prédire, et pour cause, depuis quinze jours ont payé ou poussé jusqu'à ces prix. Leur plan se précise. De naïfs jeunes peintres ne manqueront pas de tomber dans leur piège. Ils imiteront l’imitateur Picasso qui pasticha tout et ne trouvant plus rien à imiter sombra dans le bluff cubiste. Ainsi les qualités de mesure et d’ordre de notre art national disparaitront-elles peu à peu à la grande joie de M. Thannhauser et de ses compatriotes qui, le jour venu, n’achèteront plus des Picasso mais déménageront gratis le Musée du Louvre que ne sauront pas défendre les snobs aveulis ou les anarchistes intellectuels qui se font leur complices inconscients. L’argent qu’ils ont dépensé hier aura été bien placé »[i]. La publicité, voire même une certaine forme d’hystérie, autour des résultats financiers de l’opération profita à Picasso et aux artistes d’avant-garde dont on ne cessait plus de parler à Paris, mais aussi au-delà des frontières. Elle exacerbait également le chauvinisme des ultraconservateurs qui voyaient un complot contre la tradition artistique française. Sans fondement valable, l’intérêt pour l’art moderne Outre-Rhin n’était sans doute pas étranger au travail de Kahnweiler pour faire connaître ses poulains. A l’hiver 1913, le marchand, s’était en effet associé à son confrère et compatriote pour organiser la plus grande exposition personnelle de l’artiste espagnol dans la galerie de Thannhauser à Munich[ii].
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