C'est au mois de mars dernier qu'a été annoncée la construction d'une extension 1600 m2 du musée Picasso de Barcelone. Cette dernière, située derrière les palais de la rue Montcada, a été conçue par l'architecte Jordi Garraçès, qui se charge, depuis une trentaine d'années, de l'entretien, de la restauration et de l'extension des palais de la rue Montcada qui abrite l'actuel musée.
Le directeur du musée, Pepe Serra, s'explique sur cette démarche. Il souhaiterait pouvoir mettre à la disposition des jeunes chercheurs un lieu à la fois accueillant et pratique, afin de favoriser les études sur la technique picturale ou l'oeuvre de Picasso.
Le centre de recherches, dirigé par Juan José Lahuerta, sera doté d'un fond d'archives très riche, composé, d'une part, des archives personnelles de Jaume Sabartès, ami de jeunesse et secrétaire particulier de Picasso, décédé en 1968 et, d'autre part, de documents acquis par le musée du fonds Sabartès/Pilar Solano appartenant à la galerie Miquel Alzueta et comprenant environ 600 photographies de l'artiste et une abondante correspondance. En favorisant les études sur l'artiste, Pepe Serra souhaiterait en effet voir fleurir de nouveaux thèmes de réflexion sur l'esthétique, la technique, l'évolution de l'oeuvre de Picasso. Verront également le jour un centre de documentation regroupant des sources sonores, visuelles et écrites, une bibliothèque et une nouvelle ligne de publications scientifiques. Le musée travaillera aussi bien à la production et à la diffusion de travaux scientifiques sur la vie, l'oeuvre et les techniques de travail de l'artiste qu'à l'encouragement de nouvelles créations artistiques.
Pepe Serra souhaiterait également revoir le principe de catalogage de l'oeuvre, le dernier datant du début des années 1980, réalisé au moment de la grande rétrospective du MoMa de New York, lors du départ de Guernica à Madrid. Ce catalogage a été bien entendu augmenté à l'occasion de l'ouverture du musée Picasso de Paris, lui même doté, depuis la fin des années 1990, grâce au travail des équipes du musée, d'une documentation sur l'artiste exceptionnelle. Il s'agit de papiers personnels de Picasso, de correspondances, photos, notes de l'artiste. On sait à quel point Picasso aimait garder, conserver, acquérir toutes sortes de papiers: courrier, petits mots, échanges anodins ou lettres de personnalités en vue. Les traces en papier de sa vie longue et pleine sont autant de témoignages d'une époque, de ses modes, des hommes et femmes qui l'ont marquée. Au fil des ans, archivistes, collectionneurs et conservateurs ont traité et classé ces masses de papiers et de photos pour établir des fonds d'archives désormais ouverts au public. À Paris comme à Barcelone, le chercheur peut ou pourra ainsi entrer dans l'intimité de l'artiste et percevoir l'infime et le secret, l'essentiel et le vrai de son travail. Tout était important pour Picasso. Ce qu'il a pu conserver ou, du moins, ne pas jeter, nous en dit long sur sa personnalité, ses propres recherches, ses goûts et ses envies, sur les traces qu'il a souhaité laisser après lui. La démarche des musées de Barcelone et de Paris est intéressante: on offre désormais dans un musée une place à part entière aux archives, aux manuscrits, aux documents, prélude d'une autre vision des archives de la mémoire laissée par les artistes.
Le nouvel édifice de Barcelone, dont la construction devrait débuter en 2009 ouvrirait ses portes en 2011. Ce nouvel édifice devrait redéfinir le positionnement du musée dans le quartier, en facilitant la communication entre les palais et les rues arrière, communication qui demeurait jusqu'à présent un problème. «Repenser Picasso», telle est la devise du musée. Parallèlement au centre de recherches, seront proposées des expositions d'artistes contemporains. Cette démarche devrait voir le jour dès le premier trimestre 2010, en collaboration avec le musée d'art contemporain de Barcelone, le Macba, avec la présentation du Canadien Rodney Graham.
Le musée Picasso de Barcelone a ouvert ses portes en 1963, dans la ville où l'artiste fit ses débuts, sur une idée de Picasso lui-même et de Jaume Sabartés. Il conserve actuellement 3800 oeuvres et sa collection se concentre essentiellement sur les travaux de jeunesse du peintre.
(B. Caille)
Portait de Sabartes en joueur de Diaule, 14 octobre 1946 (Museo Picasso Barcelone Gasull Fotografia)