Ainsi que Anne Lajoix nous le rappelle judicieusement dans son article sur Jean Van Dongen dans la revue 2011 du Vieux Marly, Picasso ne découvre pas la céramique à Vallauris en 1947. Dès son enfance à Malaga, Picasso a été baigné par les arts du feu dont la tradition hispano-mauresque en Andalousie était en encore très forte.
Son installation au Bateau-lavoir dans l'atelier de Paco Durrio, un céramiste basque espagnol qui avait travaillé avec Gauguin a été un maillon supplémentaire dans la chaine des influences qui le menèrent vers un travail intense de la céramique dans l’immédiat après-guerre à Vallauris.
Cependant, il ne faut pas oublier une étape parisienne réalisée en compagnie de Jean Van Dongen, frère méconnu de Kees Van Dongen. Moment éphémère dont seules deux pièces conservées au Musée Picasso de Paris attestent le travail en commun en 1929.
Jean Van Dongen est arrivé à Paris en 1904 après des études d'architecture aux Pays-Bas; Il s’installe lui aussi au Bateau-Lavoir avec son frère et la bohème espagnole. Il épouse bientôt une chanteuse du Lapin Agile, Marie-Louise Esnault. Il semble qu'il ait travaillé dès 1904 avec Paco Durrio , mais son travail n'est pas documenté.
En revanche, il sera le praticien de Maillol à partir de 1922. (Pour plus d'information à ce sujet, lire l'article de Anne Lajoix dans la revue 2011 du Vieux Marly paru à l'occasion de l'exposition «Maillol et Marly» au Musée-Promenade de Marly jusqu'au 29 janvier 2012).
Picasso garda toujours auprès de lui ces deux vases, une photographie de son atelier Rue de La Boétie montre le Vase aux baigneuses trônant sur la cheminée. Ces deux vases ont été fabriqués par Jean Van Dongen, Picasso les a ensuite décoré selon les indications techniques de Van Dongen à l'aide d'émaux et d'engobes. Si l'utilisation de cette technique resta unique à cette période dans l'oeuvre de Picasso, les thèmes abordés dans le décor font partie de ses préoccupations du moment. En effet, les peintures de la fin des années 20 seront peuplées de ces baigneuses aux corps désarticulés et ces figures monumentales renouvèleront sa pratique de la sculpture. Quant au vase globulaire qui laisse apparaitre deux grandes mains enserrant un poisson, cela fait partie d'une vaine plus ludique chez Picasso, une mise en abyme qu'il utilisera, de nouveau, souvent chez Madoura à Vallauris: les mains dessinées sont aussi les mains du céramiste façonnant le vase, comme les pichets fleuris dessinés sur les pichets de terre sont destinés à accueillir des fleurs ....
Mains tenant des poissons, 1929 (vase globulaire en terre rosée) Musée Picasso Paris